Progrès dans la lutte contre le blanchiment d’argent

Ces dernières années, les banques et les gérants de fortune ont été mêlés à de nombreuses affaires de blanchiment d’argent liées à d’importants cas de corruption. La FINMA a par conséquent orienté sa surveillance dans la lutte contre le blanchiment d’argent vers les établissements aux prises avec des cas de blanchiment d’argent internationaux.

Dans le cadre de sa surveillance courante, la FINMA vérifie si les établissements ont tiré les enseignements des cas comme Petrobras, Odebrecht, 1MDB, les Panama Papers, la FIFA ou PDVSA. Par ailleurs, elle s’engage en faveur d’une harmonisation de la surveillance par les OAR.

Au cours de son activité de surveillance, la FINMA a rencontré de nombreux exemples de pratiques positives. Maints établissements ont considérablement amélioré ces derniers temps leur prévention en matière de blanchiment d’argent. La FINMA continue toutefois d’être confrontée également à des cas négatifs. Lorsque cela se révèle nécessaire, elle engage des mesures d’enforcement.

Exemples positifs tirés de la pratique

✔ Après clarifications auprès de clients qui, selon des articles parus dans les médias, sont mêlés à un cas de blanchiment d’argent international, un intermédiaire financier vérifie si les critères qui définissent les relations d’affaires et les transactions comportant des risques accrus sont suffisants ou s’ils peuvent être améliorés.

✔ Après réception d’une demande de production de pièces par le Ministère public de la Confédération, un intermédiaire financier vérifie quelles sont les autres relations commerciales liées à celle qui a été signalée. Si les conditions nécessaires sont réunies, il effectue une annonce au Bureau de communication en matière de blanchiment d’argent (MROS).

✔ Une banque ouvre des comptes commerciaux pour un groupe étranger et des comptes privés pour les dirigeants. Ni le groupe ni ses dirigeants ne présentent un lien avec la Suisse. Les signataires autorisés des sociétés opérationnelles versent les bonus directement sur leurs comptes privés. La banque remet en cause cette pratique et procède à des clarifications approfondies.

✔ Une banque vérifie régulièrement par sondage manuel le fonctionnement des processus automatisés en matière de conformité. Elle détecte ainsi qu’en raison d’un problème informatique, des mises à jour d’une base de données externe n’ont pas été comparées avec le registre clients, et résout ce problème.

✔ L’analyse des risques d’un intermédiaire financier prend en compte les risques en matière de financement du terrorisme.

Exemples négatifs tirés de la pratique

✘ Un important intermédiaire financier a paramétré la comparaison automatique avec une base de données externe de sorte que seuls les noms identiques génèrent une correspondance. Un nouveau client est introduit avec un double nom dans le système de la banque, alors qu’il apparaît sans double nom dans les bases de données externes. Faute de correspondance, la banque ne reconnaît pas la PPE.

✘ Un intermédiaire financier augmente la fortune minimale exigée pour qu’une PPE étrangère soit admise comme client de l’établissement. Au lieu de se séparer des PPE aux avoirs inférieurs, les collaborateurs estiment que de nombreuses PPE n’exercent plus d’activité politique et donc que ces relations ne doivent plus être gérées comme des relations PPE. Pour d’autres relations, ils constatent que la classification en tant que PPE était inutile depuis le début. La suppression du statut de PPE n’est pas remise en question par les supérieurs.

✘ Un négociant en valeurs mobilières d’un Etat des Caraïbes est client d’une banque suisse. La banque renonce à identifier les ayants droit économiques, à savoir les clients du négociant en valeurs mobilières car son propre client est assujetti à une surveillance prudentielle. En présence d’un soupçon de délit d’initié, la banque n’est pas en mesure de nommer les ayants droit économiques aux autorités pénales suisses.

✘ Une banque a signé la convention relative à l’obligation de diligence de l’Association suisse des banquiers, se soumettant dès lors au régime de sanction de droit privé correspondant. Malgré de graves violations de la CDB, la banque renonce à une autodéclaration.

Jurisprudence claire en matière de communication

La communication des valeurs patrimoniales suspectes a une importance stratégique pour la réputation de la place financière. Si les criminels savent qu’en Suisse, les valeurs patrimoniales suspectes sont annoncées aux autorités, ils seront moins enclins à y déposer des avoirs délictueux. Le Tribunal administratif fédéral, le Tribunal pénal fédéral et le Tribunal fédéral ont précisé dans une série d’arrêts récents à quel moment un intermédiaire financier était tenu d’effectuer une communication. Le dernier arrêt du Tribunal fédéral du 21 mars 2018 (1B_433/2017, consid. 4.9) fournit l’explication suivante: «Si les clarifications d’arrière-plan au sens de l’art. 6 al. 2 LBA [...] ne permettent pas d’écarter un soupçon, celui-ci est considéré comme fondé [...].»

Selon les chiffres publiés par le MROS dans son rapport annuel 2017, les communications des intermédiaires financiers sont en augmentation constante. En 2017, elles ont doublé par rapport à 2015. Cette augmentation ne résulte pas de la multiplication de petites affaires puisque les sommes impliquées s’élevaient en moyenne à 3,5 millions de francs en 2017. De plus, le taux élevé de communications transmises aux autorités pénales est un signe de leur qualité. L’infraction la plus fréquemment annoncée est la corruption, suivie de la fraude. La première met en évidence l’exposition de la place de gestion de fortune suisse aux fonds étrangers provenant de la corruption. La nette hausse des communications au MROS indique un changement de culture des banques à ce sujet. D’autres segments du marché financier sont encore réticents. En 2017, les avocats n’ont ainsi effectué que quatre communications au MROS à l’échelle suisse.

Harmonisation des concepts de surveillance OAR

Dans son quatrième rapport d’évaluation mutuelle de la Suisse, le GAFI a critiqué le système de surveillance des OAR, en particulier l’hétérogénéité des concepts de surveillance entre les différents OAR et la prise en compte insuffisante, voire absente des risques liés aux intermédiaires financiers. Le rapport déplore par exemple les divergences d’évaluation des risques liés aux activités du secteur parabancaire. Il déplore également l’absence de critères de risque inhérents à une activité dans les concepts de surveillance.

Au vu de cette évaluation, la FINMA entend améliorer et harmoniser ces concepts. Après avoir communiqué les étapes et les attentes à cet égard aux OAR en 2017 déjà, elle s’est concentrée en 2018 sur la révision matérielle ainsi que la finalisation des concepts de surveillance des OAR. Dans ce processus, la FINMA a offert à ces derniers un accompagnement parfois très étroit.

Priorités en matière de surveillance des OAR

La FINMA a axé cette année sa surveillance des OAR sur leurs ressources destinées à l’exécution de leurs tâches principales, à savoir l’admission de nouveaux membres, la surveillance ainsi que les mesures et les procédures de sanction à l’égard des membres. A cet effet, la FINMA a examiné en 2018, lors des contrôles qu’elle a effectués sur place, quelles étaient les ressources engagées par les OAR pour effectuer leurs tâches principales.

Sa deuxième priorité portait sur les procédures de communication au MROS. Elle s’est penchée avant tout sur les violations de l’obligation de clarification des membres OAR et sur la question de savoir si, dans le traitement de ces cas, les OAR ont également contrôlé l’existence d’une éventuelle violation de l’obligation de communiquer.


(Extraits du rapport annuel 2018)

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